Conseil régional d’Auvergne
Session du 30 juin 2015
Groupe Front de gauche
Intervention liminaire de madame Evelyne Valentin
Conseillère régionale d’Auvergne – Groupe Front de gauche
Monsieur le Président,
Mesdames et messieurs les conseillers,
Comment devant cette assemblée des élu-e-s du Peuple ne pourrais-je faire part de notre profonde inquiétude démocratique face à ce qui se passe en Grèce. Des organismes non élus, comme la Commission Européenne, la BCE et le FMI veulent mettre à genoux et enfoncer encore plus un peuple dans l’austérité alors que ce peuple a clairement et démocratiquement montré sa volonté d’en sortir. Parce que notre slogan est « L’Humain d’abord » nous tenons à réaffirmer notre total soutien au peuple grec. Nous le disons sans provocation à quoi sert d’organiser des élections régionales en 2015, des présidentielles et législatives en 2017 si ce sont ceux qui n’ont aucun compte à rendre au peuple qui décident à leur place.
En octobre 2012, le prix Nobel d’économie, Joseph Stiglitz déclarait, dans un entretien aux Inroks, que « L’austérité va détériorer encore plus l’économie française ». Cette affirmation, partagée par de plus en plus d’économistes, se révèle véridique. Notre groupe n’a d’ailleurs jamais arrêté d’alerter sur les effets dévastateurs des politiques dominées par la baisse de la dépense publique.
Pendant toute la durée de ce mandat, nous avons gardé des prises de position et des analyses constantes sur le gel puis les baisses de dotations, sur les orientations de la politique fiscale visant à faire toujours plus de cadeaux au patronat sans aucune contrepartie. Nous le disons et nous le redirons, au tant que nécessaire, l’austérité nous conduit dans le mur.
Avec l’ordre du jour de la session d’aujourd’hui, nous sommes encore amenés à dresser le constat de la nocivité, sur l’investissement public, de la politique austéritaire menée par le gouvernement. Du Compte administratif 2014 à la Décision modificative n°1, nous déplorons encore une fois les lourdes contraintes pesant dans le budget de notre collectivité.
En effet, loin d’être un simple document comptable, le Compte administratif nous permet de mesurer, à la fois, l’exécution de nos politiques publiques et les effets que peuvent avoir les politiques de l’Etat en direction des collectivités territoriales.
Alors que le candidat F. Hollande avait promis une vaste réforme fiscale pour redonner des moyens budgétaires supplémentaires aux collectivités, nous constatons, encore une fois, que nous bénéficions d’une très faible autonomie fiscale et donc des marges de manœuvre sur nos recettes quasi inexistantes. La baisse de la Dotation Globale de Fonctionnement a enlevé 4.5 M€ sur notre budget et ce malgré les changements de mécanisme de la péréquation. Nous pensons que cette dernière ne peut servir à cacher les désengagements successifs de l’Etat. La péréquation doit rester avant tout un dispositif de solidarité jouant un rôle de correcteur face aux inégalités engendrées par les transferts de compétences issus des actes décentralisateurs.
De plus, au regard des chiffres avancés dans la Décision modificative, nous percevons déjà 1.29 M€ de baisse supplémentaire portant sur un ajustement concernant les dotations de l’Etat. Comme cela est indiqué dans le document de présentation, cet ajustement porte principalement sur une nouvelle baisse de 900 K€ de la DGF, amenant la diminution pour 2015 à -10.9 M€ !
Cette réduction drastique des dotations étatiques est imposée de force par un gouvernement obsédé par la baisse de la dépense publique et par l’application aveugle d’une politique de l’offre, se traduisant par 41 milliards de cadeaux en tout genre en direction des entreprises.
Avec une coupe de 28 milliards d’euros cumulés d’ici 2017 dans leurs dotations, les collectivités territoriales sont poussées par le gouvernement à réaliser des arbitrages budgétaires ultra difficiles. Les effets se font déjà ressentir avec un constat de réel repli de l’investissement public. Une note de conjoncture de la Banque Postale, datant de mai 2015, laisse apparaitre, une nouvelle fois, une baisse des investissements des collectivités de l’ordre de 3.9 Milliards d’€ en 2015, contre 5 milliards en 2014. De plus, toujours selon la Banque Postale, l’épargne brute des régions, des départements et des communes continuerait une descente aux enfers avec une réduction de 34.8 milliards d’euros en 2015.
Concernant la Région Auvergne, le compte administratif et le rapport spécial sur la situation de la collectivité, laissent apparaître une certaine stabilité de notre santé financière. Il faut rappeler qu’ils ont été, tout de même obtenus en sacrifiant ou en compressant de nombreuses dépenses. Ce Compte administratif est, en quelque sorte, le reflet des traités européens et des volontés de la commission européennes consistant à sabrer les dépenses utiles aux populations, au nom d’une sacro-sainte stabilité !
Pour développer de véritables politiques publiques nous avons besoins de moyens supplémentaires. Comment pourrions-nous faire face aux défis posés par la future grande Région Auvergne-Rhône-Alpes, si nous les budgets ne suivent pas ? Comment concevoir que les territoires de cette grande région puissent se développer en harmonie et dans une égalité territoriale absolue, si nous ne possédons pas les moyens de ces ambitions fondamentales ? Nous l’avons déjà dit, les dangers liés aux nouvelles frontières régionales sont immenses. Les risques d’une région à plusieurs vitesses sont réels.
D’autant que l’ensemble des politiques gouvernementales s’inscrivent dans une sorte de marche forcée vers la compétition territoriale et la marchandisation des services publics. La loi Macron, tout comme le rapport parlementaire du député Philippe DURON, se propose d’accélérer un mouvement antisocial et anti-démocratique.
Avec la libéralisation des autocars, c’est la guerre ouverte contre la SNCF et le réseau de chemin de fer qui est déclarée. Véritable contre sens écologique, la loi Macron s’inscrit dans une dérive libérale et anti-écologique visant à transférer les activités voyageurs et transports de marchandises du rail vers la route. Lors de son audition à la commission DURON la SNCF a chiffré à 60 M€ le déficit supplémentaire la première année.
Dans ce même rapport, sur l’avenir des trains Intercités, les préconisations qu’il porte sont de véritables bombes contre le service public, l’environnement ou encore l’aménagement du territoire. Elles vont clairement dans le sens d’un démantèlement continu et accéléré du réseau national de chemin de fer.
Le Massif Central et l’Auvergne sont encore une fois dans le collimateur de la politique libérale de l’Etat. Alors que les régions Auvergne et Rhône-Alpes sont appelées à fusionner dans près de six mois, les possibles fermetures des lignes TET Lyon-Bordeaux, Clermont-Fd-Béziers, Clermont-Fd-Nîmes et Montluçon-BOURGES et Clermont –Bordeaux sont des handicaps supplémentaires pour les bassins concernés et pour toute la région Auvergne.
C’est la mission de l’Etat dans l’aménagement territorial qui est remis en cause au travers d’un net désengagement sur les régions avec le transfert des liaisons TET. Alors que celles-ci sont déjà mises fortement à contribution dans le cadre des restrictions budgétaires, nous sommes particulièrement dubitatifs sur les compensations financières de ces éventuels transferts aux conseils régionaux. Il ne faut pas oublier qu’à l’occasion de la régionalisation des Trains express régionaux (TER) en 2002, l’Etat avait promis des compensations à l’euro près. Une promesse non tenue puisque les compensations sont figées depuis dix ans.
Je rajouterai aux forts doutes que nous avons, les dernières annonces faites par le premier ministre de procéder à une baisse du produit issu du Versement transport. Manuel Valls, accédant une nouvelle fois aux revendications patronales propose donc de modifier le seuil du VT qui passerait de 9 à 11 salariés pour le déclenchement du versement transport des entreprises.
Ce nouveau cadeau au patronat représente nationalement une perte de recettes publiques de 500 millions d’euros! Cela irait encore à contre sens d’un développement massif des transports collectifs comme alternative au tout voiture en condamnant toute politique environnementale visant à baisser nos émissions de gaz à effet de serre. Alors que les régions demandent depuis un certain nombre d’années qu’une part du VT leur revienne, dans le cadre de la compétence TER, une telle annonce risque de repousser à très loin tout espoir de voir le gouvernement accéder à cette revendication essentielle. Je rappelle que la loi sur la réforme ferroviaire prévoyait un rapport sous les 2 ans au sujet des ressources pérennes aux régions au lieu de ça c’est un relèvement du seuil du Versement Transport pour les autres autorités organisatrices qui est annoncé.
Je le redis, si nous voulons des politiques de solidarité qui protègent nos concitoyens de la crise actuelle, il faut que les collectivités puissent avoir des moyens financiers adéquats.
Il faut en terminer avec les orientations austéritaires qui créent tant de souffrances et d’inégalités, qui asphyxies les collectivités et les freinent dans leurs politiques de développement. En 2014, les 100 plus grandes fortunes se sont accaparés la vertigineuse somme de 257 Milliards d’€, soit une progression de 10% en un an ! On voit donc bien que l’austérité n’est pas réservée aux étages les plus hauts de la société. Cette austérité, s’abat avec une violence inouïe sur les couches populaires et les classes moyennes. L’argent coule à flot pour certains quand pour d’autres les robinets sont bloqués par un gouvernement engagé dans une lutte des classes sans précédent en faveur des détenteurs de capitaux.
Rien n’est immuable pourtant ! L’argent existe pour nous sortir de la crise et entrevoir une relance économique digne de ce nom. Dans le cadre d’une politique alternative à gauche, les collectivités doivent être utiles aux populations et à l’intérêt général. Avec la constitution d’une grande région, nous pensons que des politiques de solidarités et de justice sociale devront être mises en œuvre.
Les élu-e-s communistes et Front de gauche entendent agir et être utiles pour tirer vers le haut les politiques des deux collectivités. Aucun territoire ne devra être oublié demain, aucun territoire ne pourra être mis en concurrence dans le cadre de politiques publiques de coopération.